Abbé Louis Bousquet

Authenticité du transfert
des reliques de Sainte Foy
d’Agen à Conques

(Extrait de la Revue du Rouergue de Janvier-Mars 1953)

P. Carrere - Rodez
1953

Évêché de Rodez

Rodez, le 28 Avril 1953.

Cher Monsieur l’Aumônier,

Une fois de plus vous avez mis votre érudition considérable au service de « la défense et illustration » d’une de nos gloires rouergates parmi les plus solides. Vous savez combien, en notre Avéyron chrétien, tout ce qui est diocésain me touche. Soyez donc vivement félicité de la savante mise au point que vous avez faite.

L’Evêque de Rodez ne veut pas entrer dans la guerre en dentelles qui se livre autour de la gracieuse petite sainte Foy, que vénèrent tant de diocèses de France et de l’étranger.

Mais comment, après votre article daté du 14 janvier, ne signalerait-il pas à vos lecteurs son émotion, quand, le 26 février dernier, devant des représentants officiels des Beaux-Arts attirés par la nécessité de restaurer nombre de pièces du Trésor de Conques, il « reconnut », entre autres reliques, celle de la calotte crânienne de la jeune martyre? La minutie scientifique de la reconnaissance faite par le futur Cardinal Bourret, en 1875 et les années suivantes, éclatait aux yeux de tous les assistants, dont vous étiez.

La tranquille possession où nous sommes, depuis tant de siècles, de ces précieux restes enlèverait-elle quelque gloire à une très chère Eglise sœur? Ce serait alors diminuer celle de Jérusalem où l’on vénère le Sépulcre du Christ et celui de la Vierge, celle du Vatican et du cimetière de Lisieux où les pèlerins vont prier sur des tombeaux vides mais toujours aimés ; et combien d’autres? N’y a-t-il pas là plutôt lien profond, dans la communauté du même culte pour la charmante et héroïque martyre, entre deux diocèses? Daigne Dieu, par l’intermédiaire des saints « Anges », dont l’un de mes plus illustres prédécesseurs répandit autrefois le culte, les resserrer toujours plus!

Veuillez croire, cher Monsieur l’Aumônier, à mes très dévoués sentiments en N.-S. et N.-D.

✝ Marcel-Marie Dubois,
Evêque de Rodez.

/1/

Authenticité du transfert
des reliques de Sainte Foy
d’Agen à Conques

Le 14 janvier d’une année du dernier quart du ixe siècle antérieure au 30 juillet 883, les reliques de sainte Foy, martyre Agenaise du iiie ou ive siècle, faisaient leur « entrée » dans l’abbaye de Conques en Rouergue où elles sont encore conservées. Pareille translation du corps de sainte Foy d’Agen à Conques au cours des dernières décades du ixe siècle était considéré jusqu’à ce jour comme un fait historique on ne peut plus solidement établi. Sa réalité n’avait encore été mise en doute, que l’on sache, ni par les grands érudits de la fin du xviie et du xviiie siècle : Jean Mabillon, les Bénédictins auteurs de la Gallia christiana, les Bollandistes, les Bénédictins auteurs de l’Histoire de Languedoc (1), ni plus récemment par des critiques aussi avertis que l’étaient Gustave Desjardins, Auguste Molinier, l’abbé Bouillet, Mgr Louis Saltet, Ferdinand Lot et M. Léon Levillain (2). Seule était objet de discussion entre spécialistes, une circonstance de temps : la date exacte d’année de cet événement.

C’est contre ce fait si unanimement admis par ces princes de la critique – la présence à Conques à partir des dernières années du ixe siècle de la dépouille mortelle de sainte Foy en suite d’une translation d’Agen qui fut son berceau et où se trouvait sa tombe – que s’élève et s’inscrit en faux M. le chanoine Angély du chapitre et de la Société Académique d’Agen. Et sa réaction ne pèche pas par /2/ manque de vigueur, voire de véhémence. A l’en croire, les reliques de sainte Foy n’auraient à aucun moment quitté Agen pour prendre le chemin de l’abbaye Rouergate. Leur présence dans cette dernière est « a priori plus que douteuse ». Elle devient « inacceptable », passée au crible de la critique historique « la fabulation – translation violente du corps saint – composée par les moines pour expliquer cette tumulation [de sainte Foi d’Agen à Conques] ». En bref, malgré « la vaste audience et la longue créance » qu’on veut bien lui reconnaître, la détention des reliques par Conques n’est qu’invention intéressée de moines, « fabulation, légende et partant inadmissible prétention ».

Telle est la thèse soutenue par M. le chanoine Angély au Congrès d’études régionales de Cahors, en mai 1950, au cours d’une lecture dont la substance a fait l’objet d’un mémoire publié dans la Revue de l’Agenais sous le titre suggestif : La prétendue tumulation de sainte Foy d’Agen à Conques (1).

En présence d’assertions aussi catégoriques qu’opposées aux idées jusqu’ici reçues en la matière, on pourrait croire que l’auteur a eu l’heureuse et rare fortune de mettre la main sur quelque importante documentation inconnue de ses prédécesseurs en érudition. Qu’on se rassure : il n’en est rien. M. Angély n’apporte ni faits ni témoignages nouveaux. Et à le lire on ne tarde pas à s’apercevoir que c’est bien plutôt une méconnaissance partielle, et dans son contenu et quant à sa valeur, du dossier de la translation de sainte Foy d’Agen à Conques qui est à l’origine de ses singulières assertions. Force est donc, bien qu’il n’ait rien d’inédit, de mettre une fois de plus ce dernier sous les yeux du lecteur. C’est ce qu’on fera dans une première partie ; on examinera ensuite les quelques difficultés soulevées par l’auteur de La prétendue tumulation de sainte Foy d’Agen à Conques (2).

C’est un fait indéniable que tout ce qui touche de près ou de loin à la jeune martyre Agenaise à partir du transfert de sa dépouille /3/ sainte à Conques a été, à travers les remous des siècles, objet d’extraordinaire – certains disent providentielle – conservation. Le dossier historique attestant la présence, dès l’avant dernière décade du ixe siècle, en suite d’une translation, de ses reliques dans l’abbaye rouergate ne fait pas exception. Son contenu, d’une rare richesse, offre d’abord une imposante masse de documents diplomatiques, des témoignages liturgiques qui à eux seuls suffisent à établir l’historicité du transfert, un unique ensemble de documents archéologiques, le tout constituant autant de sources objectives, directes, matérielles, d’une autorité et d’une valeur incontestable et dont M. le chanoine Angély paraît à peine soupçonner l’existence. Viennent ensuite les sources narratives ou littéraires, celles-là subjectives, médiates, mais qui ne sont pas, pour autant, à dédaigner : les deux récits, l’un en vers, l’autre en prose, de la translation de sainte Foy d’Agen à Conques, le témoignage de Bernard d’Angers au Livre des miracles de sainte Foy, celui du Guide du pèlerin de Saint-Jacques de Compostelle, celui de la Chronique de Conques, enfin – argument ad canonicum Angély – l’attestation du poème occitan dit Chanson de Sainte Foy,

1º Témoignages diplomatiques. – Echappé par une heureuse conjoncture à l’autodafé révolutionnaire de l’important chartrier monastique, le Cartulaire de l’abbaye de Conques en Rouergue conserve copie de plus de cinq cent chartes « parfaitement sincères » : diplômes royaux, donations, ventes, échanges, contrats de précaire, etc., échelonnées tout au long des ixe, xe, xie et xiie siècles (1). Les donations, en grand nombre, rédigées pour la plupart en forme d’épitres – epistolae donationis – comportent dans leur protocole initial une adresse où sont présentés les titres qui rendent ce lieu de Conques et son église particulièrement recommandables à la vénération des donateurs et provoquent leurs pieuses libéralités : c’est à savoir la présence dans ses châsses d’insignes reliques. Lieu sacré situé dans le territoire des Ruthènes, dédié à notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ, cher entre tous pour les reliques qu on y vénère du Christ, de Sainte Marie sa Mère et du bienheureux Pierre, prince des Apôtres, qui a pour nom Conques, tel est le début de la plus ancienne donation – elle est de février 801 – sur laquelle s’ouvre le cartulaire de l’abbaye (2). De même une charte de mars 852 est adressée à l’église sacro-sainte /4/ du Saint-Sauveur, de Saint-Pierre et autres saints du monastère de Conques (1).

Mais une donation datée du iii des calendes d’août de l’an iv du règne de Carloman – donc indubitablement du 30 juillet 883 – est faite au lieu saint de la sainte église de Dieu du monastère de Conques fondé en l’honneur du Saint Sauveur, de la Sainte et toujours Vierge Marie, de Saint Pierre, détenteur des clefs du royaume céleste et où saint Vincent et sainte Foy reposent ensevelis : hubi sanctus Vincentius et sanctae Fides tumulati quiescunt (2). C’est la plus ancienne attestation de la présence du corps de sainte Foy à Conques. Elle est reprise quelques années plus tard dans une charte de mai 887 où l’église de Conques est dite dédiée au Christ, à la Vierge Marie, à saint Pierre, aux martyrs saint Vincent et sainte Foy où leurs reliques reposent soigneusement conservées : Locum sacrum sanctae ecclesiae qui est constructus in honore domini nostri Jhesu Christi... seu et sancti Vincentii et sancte Fidis martires reliquie eorum ibi requiescunt condita sunt (3). La donation qui suit dans l’ordre chronologique, de la dernière année du ixe siècle (septembre 899), affirme à nouveau que l’église de Conques conserve les reliques de saint Vincent et de sainte Foy et cela avec magnificence : Hubi sanctus Vincentius et sancia Fides gloriosissime conditi sunt (4).

Et tout au long des xe et xie siècles se succèdent, nombreuses, – 66 pour le xe siècle, 84 pour le xie siècle – les chartes affirmant on ne peut plus explicitement la présence à Conques de la dépouille mortelle de la sainte martyre Agenaise. Les formules en sont diverses : Locum sacrum sanctae Dei ecclesiae... ubi sancta Fides vel sanctus Vincentius tumulati consistunt. – Lieu sacré de la sainte église de Dieu où sainte Foy et saint Vincent reposent ensevelis, semble de beaucoup la plus courante (5). Certaines paraissent vouloir particulièrement insister sur la matérialité de cette présence : Locum sacrum sancti Salvatoris Conchas monasterii... ubi sanctus Vincentius et sancta Fides tumulati requiescunt in corpore. – Lieu Sacré du monastère de Saint-Sauveur de Conques... où saint Vincent et sainte Foy reposent corporellement (6). Enfin une pièce de 1058 fournit la précieuse indication suivante sur l’origine même du corps saint : Robert II, comte d’Auvergne et aussi de Rouergue de par sa femme Berthe, héritière du /5/ dernier comte rouergat de la première race, fait, de concert avec sa mère Philippie, une importante donation au monastère qui a nom Conques où l’incomparable vierge et martyre Foy transportée de la ville d’Agen y repose avec le bienheureux martyr Vincentad monas-terium qvtod dicitur Conchdeense, ubi maxima virgo et martyr Fides ab Agetino urbe illuc translata cum beato martyre Vincentio quiescit (1).

Et ces 153 donations affirmant positivement la présence du corps de sainte Foy dans l’abbaye de Conques ne sont pas toutes, tant s’en faut, le fait de donateurs de la région de Conques, voire même de la province de Rouergue. Il en est des régions aquitaniques : d’Auvergne, de Limousin et de Périgord ; il en est des pays languedociens : du Quercy, de l’Albigeois, du Toulousain et du Narbonnais. Il en est même de Savoie et de l’île de Minorque : Moi, Bernard Guillelm, déclare un Minorquin dans une charte de novembre 1065, je suis donateur à la maison de la communauté de sainte Foy, dont le corps est dans le monastère même de Conques. – Ego Bernardus Willelmus donator sum ad domum sancte Fidei cenobii, cujus corpus est in ipso monasterio in Concas (2).

Et à ces 153 témoignages explicites pourraient être joints ceux d’au moins autant de chartes de donations qui, sans mentionner formellement cette sainte présence dans le monastère Rouergat, la supposent implicitement : c’est en effet par respect et en hommage de vénération pour les reliques de sainte Foy qu’étaient faites au monastère et aux religieux gardiens de ces saintes dépouilles ces pieuses libéralités ; il n’est pour s’en convaincre qu’à comparer le nombre des donations avant et après l’arrivée à Conques du corps de la vierge martyre Agenaise. Et ces divers donateurs sont de Languedoc, de Guyenne et de Gascogne, de Roussillon, de Provence et du Dauphiné, de Bourgogne, de Champagne et d’Alsace, d’Angleterre, d’Espagne et d’Italie. Jusqu’aux populations de l’Agenais qui, avec le temps, mettant de côté toute rancœur pour le rapt audacieux dont elles furent victimes, viennent à Conques même vénérer les reliques qui leur appartinrent et comblent de leurs dons les successeurs des moines ravisseurs. Ainsi, sous l’abbatiat d’Etienne II (1067-1087), trois frères, Bertran, Gosbert et Guilhelm Miscemalum donnent à Conques l’église de Saint-Martin de Cailles sise dans le diocèse d’Agen – in episcopatu Agennensi – entre le château de Penne et l’église de Sainte-Foy de Cailles, tandis que la veuve de Titbald et ses enfants, pour l’âme de son mari et de leur père décédé de mort subite, /6/ abandonnent en faveur du même donataire leur part de droits respectifs (1). Et combien suggestive cette donation, datée par le pontificat du pape Grégoire VII et le règne de Philippe Ier, faite au Saint Sauveur, à sainte Foy de Conques, à l’abbé Etienne et aux moines présents et à venir, de l’église Saint-Martin de Braigs par Fulco, sa femme et leurs enfants, son frère Hugues, Adhémar de Sablonag, Ebrard d’Espainols et ses frères, et ce avec l’approbation laudative du seigneur évêque d’Agen, d’Amancus son archidiacre et d’autres membres de son clergé : Hoc donum sicuti fecimus laudat domnus episcopus Agennensis et Amancus ejus archidiaconus et caeteri sui clerici (2).

De cet ensemble de témoignages parfaitement historiques ressort avec évidence le fait qu’aux xe, xie et xiie siècles ce n’est pas à Agen mais à Conques même que les populations, non seulement de France mais d’une partie de la chrétienté occidentale, vinrent trouver sainte Foy, la prier et, en reconnaissance des bienfaits reçus, dotèrent richement son abbaye, dans la conviction que cette dernière était bien gardienne de la tombe qui, parce qu’elle contenait les restes mortels de la sainte martyre, matérialisait en quelque sorte sa présence et concrétisait, pour ainsi dire, sa puissance d’intercession.

2º Témoignages liturgiques. – C’est un 14 janvier – tous les documents concordent sur cette date – que les reliques de sainte Foy d’Agen entrèrent pour n’en plus sortir dans l’abbaye rouergate de Conques qui devint désormais sa patrie posthume d’adoption. L’anniversaire de pareil événement devint dès lors objet d’une solennité liturgique dite fête de la Translation. C’est ce que nous apprend – et son témoignage, sur ce point du moins, est parfaitement recevable – l’auteur anonyme du récit en prose de la dite translation : Ce jour de la translation, écrit-il, est célébré chaque année depuis cette époque jusquà nos temps dans tous les pays avec la plus grande pompe et la solennité la plus joyeuse. On y déploie toutes les splendeurs du culte, on y goûte les délices célestes, on y fait concourir toutes les magnificences matérielles pour ajouter à l’éclat de la fête (3).

De fait, divers livres liturgiques de Conques ou d’ailleurs /7/ mentionnent ou conservent l’office de cette fête de la Translation des reliques de sainte Foy d’Agen à Conques. Tel ce précieux manuscrit du xie siècle aujourd’hui dépecé, provenant de l’abbaye de Fleury-sur-Loire et dont la Bibliothèque de l’Université de Leyde, celle d’Orléans et la Bibliothèque Nationale de Paris se partagent les fragments (1). On y trouve, pieusement colligé, l’office in Translatione sancte Fidis avec ses invitatoires, ses proses, ses répons, ses collectes, le tout curieusement noté en neumes (2). C’est, au surplus, vraisemblablement pour être chanté ce jour-là que fut composée la Translatio rimée de la sainte. Le manuscrit de Schlestadt – celui-là même qui conserve la plus complète transcription du Livre des miracles de Sainte Foy – contient une séquence versifiée de eadem Translatione (3). Dans le calendrier d’un antiphonaire du xive siècle à l’usage de l’abbaye de Conques on relève au 14 janvier la mention suivante : Translatio S. Fidis, duplex majus (4). Enfin deux manuscrits liturgiques du xvie siècle conservés à Conques, un collectaire et un missel, contiennent, parmi les offices des diverses fêtes de sainte Foy, le premier, les antiennes propres des heures canoniales de la solennité de la Translation, le second, la messe In Translatione S. Fidis V. et M. (5).

Aussi bien, la présence des reliques de sainte Foy dans l’abbaye Rouergate donna lieu à une deuxième solennité liturgique célébrée le 4 mai sous le nom d’Illatio de sainte Foy. Elle commémorait vraisemblablement la translation du corps de la sainte de l’église d’Etienne dans celle d’Odolric, l’actuelle basilique. La plus ancienne mention connue de cette Illatio S. Fidis se rencontre dans une charte curieuse conservée au Cartulaire de Conques. Aux termes de ce document de 1120 environ, Ebrard, évêque du diocèse anglais de Norwich, rappelle à l’abbé de Conques Boniface la donation faite par Robert Fitz-Walter, de Horsham, au comté de Norfork en Angleterre, sa confirmation par Henri Ier et le comte Etienne, neveu du roi, enfin la concession de quarante jours d’indulgence accordée par son prédécesseur. Il y ajoute vingt-quatre jours d’indulgence pour les fidèles qui visiteront l’église de Horsham le jour et durant la fête de l’Illation /8/ de sainte Foy : ad festum illationis beatae Fidis quod celebratur feria v infra octabas paschae usque ad aliam feria v idus usque ad octabas ejusdem festi (1). L’antiphonaire ci-dessus mentionné note dans son calendrier à la date du 4 mai pareille solennité sous la rubrique : Illatio S. Fidis, virginis et martyris, duplex majus (2), tandis que le collectaire du xvie siècle et le missel contemporain contiennent les antiennes propres et la messe de la fête de l’Illation (3). Enfin un processional écrit en 1679 à l’usage du chapitre de Conques a conservé l’hymne que l’on chantait à la procession in festo Illationis sancte Fidis, le jour de la fête de l’Illation de sainte Foy (4).

Conques, 14 janvier, Translatio S. Fidis. – Conques, 4 mai, Illatio S. Fidis, en ces brèves notations se retrouvent les deux éléments déclarés par le P. Hippolythe Delehaye nécessaires mais suffisants pour identifier un saint et, dans le cas présent, authentifier le fait de la translation de sainte Foy. Ce sont en effet ceux-là même que le savant Bollandiste nomme, d’un terme emprunté à la géométrie, les coordonnées hagiographiques ; la première, d’ordre topographique, est le lieu, l’endroit où se célèbre l’anniversaire : en l’espèce le monastère de Conques en Rouergue ; la seconde, d’ordre chronologique, est la date de mois et de jour, l’année important peu, de ces anniversaires : en l’espèce 14 janvier et 4 mai (5). Alors même que les textes narratifs de la translation ne seraient, comme le prétend, assez inconsidérément d’ailleurs, M. le chanoine Angély, que des « récits de folklore religieux », ces seuls témoignages liturgiques suffiraient à établir la parfaite historicité du fait du transfert des reliques de sainte Foy d’Agen à Conques et de leur présence, depuis les hauts siècles médiévaux, dans l’abbaye rouergate.

3º Témoignages archéologiques. – Aussi bien la présence de ces saintes dépouilles, bien que perdues en ce monastère accroché aux flancs abrupts des montagnes du Rouergue, ne tarda pas à attirer les dévots de sainte Foy. C’est désormais à Conques et non pas à Agen qu’ils vinrent la trouver, la vénérer, l’implorer. L’affluence diurne et même nocturne des pèlerins dans la basilique Saint-Sauveur où ses restes mortels avaient été déposés au maître-autel abbatial fut telle que le service divin en souffrit dans sa régularité monastique, dans ses observances bénédictines. Ce concours empressé de fidèles exigea un /9/ sanctuaire plus vaste, plus approprié au culte chaque jour grandissant de la sainte martyre. Vers le milieu du xe siècle, à l’instigation d’Etienne, évêque de Clermont de 937 à 984 et abbé de Conques à partir de 942, une nouvelle église fut, adossée au monastère, rapidement élevée. Elle était d’une grande beauté. Mais c’est en vain qu’au jour de sa consécration on tenta d’y transporter le corps vénéré de la sainte afin qu’il soit plus accessible à la dévotion des pèlerins. En le rendant miraculeusement inamovible, sainte Foy manifestait sa volonté arrêtée de ne pas quitter le chœur des moines, de ne pas s’éloigner du Saint Sauveur (1). Force fut donc de laisser au lieu de leur première déposition, sous le maître-autel abbatial, les précieuses reliques. On se contenta de les surmonter « sur la face postérieure dudit autel du Saint-Sauveur d’un monument d’un travail merveilleux – thecam mirificae machinae –, tout rutilant d’or et de pierreries et sous lequel reposait, scellée avec soin, la dépouille de la glorieuse vierge qui jouit de la félicité du Christ ». C’est à l’auteur anonyme de la Translation en prose – il écrivait dans la première moitié du xie siècle, et son témoignage paraît difficilement récusable – que nous devons ces détails aussi circonstanciés (2).

Toutefois, pour satisfaire le pieux empressement des foules pérégrinantes, on eût soin de prélever le vénérable chef de la vierge martyre et de le déposer dans un reliquaire qui, placé dans la nef, fut à la portée des fidèles. A cette ostension du chef de sainte Foy, Bernard d’Angers semble bien faire allusion dans son Livre des miracles. Décrivant la basilique qu’il vit lors de son premier pèlerinage, vers l’an 1013, il dit que le collatéral sud est dédié à l’apôtre saint Pierre, le collatéral nord à la Vierge Sainte Marie, et la nef au Saint Sauveur. « Mais comme, ajoute-t-il, de par la célébration de l’office divin cette nef est plus fréquentée, on y a transporté d’insignes reliques de la sainte martyre » (3).

Ce reliquaire du chef de sainte Foy était d’un type et d’une facture étrange, mais qui commençaient à se répandre parmi les chapitres cathédraux et les riches monastères d’Auvergne et de Haut-Languedoc : taillé en ronde bosse dans du bois – probablement une racine d’if – recouvert de feuilles d’or constellées de bijoux et de /10/ pierres précieuses, il offrait l’effigie de la Sainte assise en Majesté sur un trône épiscopal. C’est encore à l’instigation d’Etienne, évêque de Clermont et abbé de Conques qu’était due cette somptueuse statue-reliquaire. On sait que durant son épiscopat il avait fait faire pour sa cathédrale auvergnate, par le clerc Aleaume, une Majesté d’or de Notre-Dame afin d’y enclore une relique de la Vierge (1). Abbé de Conques, il fit pareillement confectionner, peut-être par le même orfèvre, la Majesté d’or de sainte Foy pour y enfermer le chef de la sainte. Encore dans les premières années du xiie siècle le souvenir de cette initiative n’était pas complètement obnubilé. La Chronique de Conques l’enregistre en effet en ces termes : Dom Etienne fit faire, à ce qu’on dit, la Majesté de la bienheureuse Foy, glorieuse vierge et martyre, où il déposa, avec les honneurs dûs, partie de son chef (2).

Or cette Majesté d’or de sainte Foy, « la plus étonnante de toutes les pièces d’orfèvrerie française », au témoignage d’Emile Molinier, existe encore. Elle existe telle que dans la deuxième décade du xie siècle la vit Bernard d’Angers, enrichie seulement dans les siècles postérieurs par la main d’innombrables pèlerins, d’une multitude de joyaux, gages de leur foi, de leur vénération et de leur amour. Et, au creux de sa poitrine subsiste toujours, telle que l’y déposa au jour béni d’une année du milieu du xe siècle l’abbé Etienne, la relique insigne : le frêle crâne de la jeune sainte martyre doublé d’une plaque d’argent. De cela, la reconnaissance faite, le 27 février 1878, par Mgr Bourret en porte l’émouvant témoignage (3).

Cependant cette église du xe siècle s’avérait bientôt à son tour insuffisante pour contenir le flot toujours croissant des pèlerins aux reliques de sainte Foy. Dans la seconde moitié du xie siècle et le premier quart du xiie, s’élevait l’admirable basilique encore subsistante, d’une ampleur exceptionnelle, bien faite avec son déambulatoire, son imposant transept, sa ceinture de collatéraux surmontés de vastes galeries, pour recevoir et canaliser dans leur dévotion au corps saint les cortèges innombrables de pèlerins (4).

Le 4 mai d’une année qui n’a pas été retenue, mais dont l’anniversaire se commémorait à cette date par la fête de l’Illatio, la sainte /11/ dépouille corporelle y fut transférée. Celle-ci, comme dans la basilique d’Etienne, dût être déposée derrière l’autel majeur et surmontée sans doute de la theca mirificae machinae, le monument d’orfèvrerie dû à la piété de ce même abbé Etienne.

Ce dispositif dût subsister jusqu’en 1568, année du saccagement partiel de l’abbaye de Conques par les hordes calvinistes (1). Il semble bien que le chevet de la basilique ait particulièrement souffert. La tourmente passée, pour renforcer les colonnes de l’abside fortement endommagées, on dût monter, les enrobant, un massif de maçonnerie à l’intérieur duquel furent emmurées, à la place même qu’elles occupaient antérieurement, les reliques de sainte Foy qui pour trois siècles allaient rester ensevelies dans cette cachette. Ce n’est, en effet, que le 21 janvier 1875 que des travaux de restauration ramenaient au jour un coffre de bois recouvert de cuir et orné de disques émaillés dont l’un portait sur sa tranche une inscription au nom de l’abbé Boniface, ce qui reportait la confection de pareille châsse aux toutes premières années du xiie siècle (2). Son contenu, troublant, comprenait entassés sans ordre, quantité d’objets divers : fragments de bois et de charbons, lames de plomb calciné, morceaux de tissus, sachets de cendres, fragments de vase en cristal de roche et de coupe en verre ciselé, débris de pièces d’orfèvrerie et sur le tout, enveloppés dans une peau blanchâtre, des restes notables d’ossements humains appartenant aux régions des côtes, des vertèbres, du bassin et des bras. Deux médecins, les docteurs Lala et Viala, après un double examen minutieux, certifièrent se trouver en présence de partie du squelette d’une jeune fille de 12 à 16 ans. Au surplus, une portion de côte portait gravé à la pointe le mot FIDES et sur trois phylactères de parchemin mêlés aux ossements se lisaient respectivement les inscriptions suivantes : RELIQ. . S . FIDEI . V . M . – REL . SA . FIDIS V . M . – FID . V . M . (3). Aucun doute n’était possible : c’était bien la majeure partie des restes mortels de la dépouille corporelle de sainte Foy qui venaient d’être découverts. Ainsi, de par ces données archéologiques on peut très précisément suivre le sort et les vicissitudes des reliques de la Sainte martyre depuis leur extraction de leur tombe d’Agen, dans les dernières décades du ixe siècle, jusqu’à nos jours où, à /12/ Conques même, elles sont encore, pieusement conservées, objet de grande vénération.

4º Sources narratives. – Bien que de caractère littéraire et par là-même subjectif, les textes qui suivent n’en constituent pas moins ; à des degrés d’ailleurs divers, des attestations dignes de créance de la translation des restes de sainte Foy d’Agen à Conques.

a) Témoignage des deux récits dé la translation de sainte Foy. – La présence dans l’abbaye de Conques en Rouergue du corps de la Sainte martyre Agenaise inhumée à Agen même est amplement expliquée dans deux récits latins, l’un en couples rimes de vers octosyllabiques, l’autre en prose, tous deux parfaitement concordants dans le narré très circonstancié du transfert (1). Voici en substance leur contenu. Ayant appris les merveilles dont le tombeau de sainte Foy dans un faubourg d’Agen était le théâtre, les moines de Conques conçurent le projet de s’emparer de cette sainte dépouille faiseuse de miracles. En conséquence, ils chargèrent un des leurs, Arinisdus (2), d’exécuter leur dessein. Celui-ci se rendit à Agen, se présenta comme simple prêtre séculier aux clercs de la basilique qui veillaient sur la tombe sainte, demanda à leur être agrégé et capta si bien leur confiance qu’au bout de nombre d’années – 10 ans précise la Translation en vers – il fut nommé trésorier, c’est-à-dire gardien du trésor convoité. Enfin un jour d’Epiphanie, tandis que ses confrères se restauraient au réfectoire, Arinisdus brisa une des extrémités du sarcophage, enleva les restes de sainte Foy et, la nuit venue, fit route vers Conques où, après maintes péripéties, il parvint porteur des reliques de la sainte qui furent accueillies en grande liesse et solennité.

On admet généralement avec le P. Bollandiste Ghesquière que la Translation en vers date de la première moitié du xe siècle, celle-ci ne soufflant mot de la tentative de transfert du corps de sainte Foy dans la basilique d’Etienne, pas plus que de la déposition de son chef dans la statue d’or. Quant à la Translation en prose, outre qu’elle mentionne l’événement précité, elle renvoie aussi au Livre des miracles dont la première partie vit le jour aux alentours de 1020 ; elle est donc postérieure à cette date. On notera encore qu’aucun des critiques qui ont eu à utiliser ces textes, sans se porter pour autant garants de tous leurs détails et en admettant même qu’Arinisdus a pu dramatiser /13/ son pieux exploit, n’a élevé la moindre objection quant à l’historicité de leur fond. Pour la première fois, sous la plume de M. le chanoine Angély, ils sont assimilés à des récits de folklore religieux et traités en conséquence.

b) Témoignage du Livre des miracles de Sainte Foy. – Dès le seuil de son œuvre, l’auteur, Bernard d’Angers, dans l’épître dédicatoire au seigneur Fulbert, évêque de Chartres, rappelle à ce dernier les entretiens qu’ils eurent maintes fois sur la sainte Agenaise et les innombrables miracles opérés par la toute puissance du Christ au monastère de Conques où sont conservées ses précieuses reliques – in loco Conchacensis cenobii, ubi sacrosanctum corpus illius veneranter excolitur (1).

Au chap. xviie du premier livre, narrant comment sainte Foy quêtait partout de l’or pour la confection d’une table d’autel, il précise que le monastère de Conques était primitivement dédié au Saint Sauveur. Mais, ajoute-t-il, lorsque le corps de notre sainte martyre enlevé furtivement par deux moines, eut été transporté, il y a déjà longtemps, d’Agen à Conques – postquam antiquitus sancte martyris corpus a duobus furtim monachis ab urbe Agenno huc allatum fuit – la multitude des miracles qu’il opéra fit donner à l’abbaye le nom de sainte Foy (2).

Bernard écrivait entre 1013 et 1020 et ce n’était certes pas le premier venu. Originaire d’Angers, élève du très révérend maître Raynold, écolâtre de Tours, commensal et confident « du plus savant des hommes de son siècle » (3), Fulbert, d’abord écolâtre de l’illustre école de Chartres, puis évêque de ce diocèse, Bernard devait dans la suite être appelé par son évêque, Hubert de Vendôme, à la direction de l’école épiscopale d’Angers. Esprit critique pour son temps – par trois fois il vint exprès d’Angers à Conques pour enquêter minutieusement sur les miracles qui s’y opéraient –, en relation avec ce que son époque comptait de lettrés : les frères Wantelme et Leowolf, chanoines de Saint-Quentin en Vermandois, Jean Scot, le parent de son maître Raynold (4), c’était un intellectuel de classe. Aussi, un maître historien, Mgr Louis Saltet, a-t-il pu qualifier son œuvre de « perle de la littérature latine du haut Moyen Age » (5). Nul intérêt, que l’on sache, ne l’incitait à aller chercher à Conques /14/ les restes de la sainte préférée si ceux-ci se trouvaient à Agen. Son témoignage prouve qu’aux alenteurs de l’an mil, à Chartres comme à Angers, on était dans la persuasion que Conques détenait les reliques de Sainte Foy. Et, si tant est que la valeur d’un témoignage est fonction de la valeur intellectuelle et morale du garant, celui de Bernard d’Angers en son Liber miraculorum sancte Fidis s’avère particulièrement de poids.

Le recueil des miracles de l’écolâtre Bernard fut continué dans la deuxième moitié du xie siècle par un moine de Conques qui tint à conserver l’anonymat. Or au 13e récit du quatrième livre il rapporte la guérison d’un Agenais du nom de Humbert qui, paralytique de naissance, se fit porter à Conques, célébra la sainte veille, la nuit qui suivit la solennité de l’Assomption, auprès du tombeau de la Sainte martyre – ante gloriose martyris propiciatorium in vigiliis pemoctaret – et recouvra l’usage de ses membres (1). On a peine à comprendre que ce malheureux Agenais se soit imposé le long et, pour un impotent de cette sorte, pénible voyage de Conques, si dans la cité même de sa province, à Agen, se trouvaient encore les reliques de sainte Foy.

Aussi bien, un fragment du Livre des miracles qui ne se retrouve plus dans les manuscrits à ce jour connus mais que nous a conservé le Gallia christiana, contient le suggestif passage suivant : La ville d’Agen était jadis la plus illustre cité de l’Aquitaine par les nombreuses reliques de ses saints patrons. J’ignore pour quel crime elle a été dépouillée de ses trésors, qui lui ont été enlevés peu à peu dans le cours des temps, les uns par la force, les autres par quelque pieuse fraude. Si jamais vous voyagez en Aquitaine, vous trouverez, comme souvent j’ai trouvé moi-même, diverses églises qui vous diront en vous montrant leurs reliques ; Voici le corps d’un martyr apporté d’Agen, voilà celui d’une vierge ou d’un confesseur, ou bien la notable partie de celui de tel saint (2). On notera que de par l’insertion de pareil fragment au Propre d’Agen de 1727 les faits y mentionnés ont reçu comme une manière de consécration canonique diocésaine (3).

c) Témoignage du Guide du Pèlerin de Saint-Jacques de Com-postelle. – Cinquième livre du Liber Sancti Jacobi ou Codex Calixtinus, ce guide destiné aux pèlerins de Compostelle leur donne des conseils pratiques pour leur pieux voyage, leur marque les sanctuaires possesseurs d’insignes reliques auxquels il convient qu’ils s’arrêtent, /15/ décrit enfin la basilique, terme de leur pèlerinage. Il va de soi que pareil texte n’a rien d’un document historique et ce n’est pas à ce titre qu’on en fait ici même état. Toutefois, en ce qui concerne les sanctuaires dénombrés, il apparaît à Joseph Bédier que « les auteurs du Livre de Saint Jacques ont visité ces églises, recueilli sur chacune d’elles des notes, formé des dossiers (1) ». Or aux Bourguignons et aux Teutons qui par la route du Puy vont à Compostelle le Guide signale, comme première étape-sanctuaire, Conques. Après un bref rappel des passions de sainte Foy et de saint Caprais il poursuit : Enfin le très précieux corps de la bienheureuse Foy, vierge et martyre, fut enseveli avec honneur par les chrétiens dans une vallée apellée vulgairement Conques ; on bâtit au-dessus une belle basilique dam laquelle pour la gloire de Dieu jusqu’à aujourd’hui la règle de Saint Benoît est observée avec le plus grand soin ; beaucoup de grâces sont accordées aux gens bien portants et aux malades ; devant les portes de la basilique coule une source excellente dont les vertus sont plus admirables encore qu’on ne saurait le dire. Sa fête se célèbre le 6 octobre (2). Pareil texte témoigne de la croyance générale dans la chrétienté occidentale, à l’époque de la compilation du Liber Sancti Jacobi, c’est-à-dire dans la première moitié du xiie siècle, de la « tumulation », pour user du terme de prédilection de M. le chanoine Angély, de sainte Foy non à Agen mais à Conques.

d) Témoignage de la Chronique de Conques. – Abstraction faite du préambule totalement légendaire et d’ailleurs plus récent, cette Chronique du monastère Rouergat composée à la fin du xie siècle sur les archives du couvent mentionne en ces termes, entre un abbé Etienne et l’abbé, Arladus, le fait de la translation : dans la suite, après l’accession au trône de France de Charles le mineur, fils de Louis, le corps de la très illustre vierge et martyre Foy fut pris à la dérobée de la ville d’Agen et porté au monastère de Conques où avec respect et vénération il fut déposé auprès de l’autel du Saint Sauveur (3).

/16/

e) Témoignage de la Chanson de Sainte Foy. – On n’eût jamais osé présenter ce vénérable texte poétique occitan, d’une importance littéraire considérable, mais d’une valeur historique nulle, si M. le chanoine Angély ne revendiquait la région d’Agen et par suite un Agenais pour sa patrie et son auteur (1). Ceci admis – dato non concesso – la Chanson de Sainte Foy apporte un témoignage non négligeable de la persuasion où étaient les Agenais, dans la seconde moitié du xie siècle, que leur cité avait été, au profit de l’abbaye de Conques, dépossédée des reliques de leur sainte martyr. Le chansonnier en effet, après avoir rappelé la déposition par l’évêque Dulcidius des restes de Sainte Foy dans un tombeau de marbre, résume succinctement en quelques vers la Translation en prose :

Poiss, per una noit molt escura,

Feiron i dui monge obertura ;

Traissun lo corps per gran gentura :

A Conchas l’aun sancta e pura,

E lijun o en escriptura (2).

Et l’auteur en un pieux mouvement d’enthousiame poétique de chanter le bonheur et la félicité du lieu que Dieu a enrichi d’une telle sainte : Heureux pays, s’écrie-t-il...

Ben es achell aitz ereubuz

O Deus tan rica sanct aduz,

Q’el fa per ella granz vertuz

E plaiz molt gentz e jogs menuz (3).

Il est pour le moins surprenant, si tant est que la Chanson ait été composée en Agenais, de retrouver sous la plume du chansonnier pareilles louanges à l’adresse de l’abbaye spoliatrice. Décidément, à /17/ Agen, non seulement on admettait le fait de l’enlèvement, mais encore on n’en conservait nulle rancœur. A moins qu’il ne faille voir dans ces laisses une des premières manifestations de l’humour gascon.

Tel est dans sa teneur le dossier historique de la translation des reliques de sainte Foy d’Agen à Conques. Sources diplomatiques, témoignages liturgiques, monuments archéologiques, textes narratifs composent un ensemble documentaire de qualité et de poids. On est à même maintenant d’apprécier et de ramener à leur exacte valeur les jugements catégoriques et sans appel émis par M. le chanoine Angély : « Les preuves mises en avant par Conques pour démontrer la dépossession agenaise ont la consistance des nuages. Il n’est pas possible de prendre en considération ces prétendues preuves de tumulation » (1). Reste à mettre en balance et à peser à leur juste poids les arguments mis en avant par M. le chanoine Angély.

S’identifiant avec Clio, M. le chanoine Angély n’hésite pas à écrire : « La critique historique [lire : M. le chanoine Angély] se trouve : 1º devant les plus fantaisistes datations du pieux larcin ; 2º devant un récit invraisemblable de folklore religieux ; 3º devant une possession authentique et constante du corps de la martyre par les Agenais » (2). Pour suivre l’auteur pied à pied, sur son propre terrain, on discutera dans l’ordre même de leur présentation chacune de ces assertions.

1º Prétendues datations fantaisistes du ptieitx larcin. – Il importe de remarquer avant tout qu’une difficulté chronologique n’autorise pas pour autant l’historien à mettre en doute la véracité d’un fait par ailleurs avéré. Nombre d’événements de l’histoire, tant ancienne que moderne, tant profane que religieuse, ne peuvent être datés avec précision et n’en sont pas moins certains. On n’en citera qu’un exemple : l’année exacte de la naissance du Christ, objet de controverses parmi les exégètes même catholiques.

Ceci dit, il reste bien vrai que les religieux de Conques n’ont pas retenu la date précise d’année de l’arrivée du corps de sainte Foy dans leur monastère. S’en étonner, c’est méconnaître et la mentalité du haut moyen âge en général, et le degré de culture, aux ixe et xe siècles, de l’abbaye rouergate en particulier. Pour ce qui est de l’état d’esprit des hauts siècles médiévaux, on a pu écrire que cette /18/ époque était caractérisée par « une vaste indifférence au temps » (1), à preuve le nombre de chartes ou de notices des xe ou xie siècles uniquement écrites pour garder mémoire d’un fait et d’où les éléments précis de datation sont absents. Ce n’est que plus tard que devait apparaître le souci de précision chronologique basée sur le chiffre. Quant à l’abbaye de Conques, la culture littéraire et historique au xe siècle y était à peu près nulle. Ceci n’est pas simple conjecture. Bernard d’Angers déplore à plusieurs fois dans son Livre des Mkacles qu’il ne se soit trouvé personne à Conques capable de relater les nombreux prodiges qui s’y opéraient ; et c’est devant pareille carence et sur les instances pressantes de l’abbé et des religieux qu’il se décida à prendre la plume pour rédiger les plus marquants (2).

Mais à défaut de date d’année, les moines de Conques gardèrent pieusement mémoire du jour et du mois de l’intronisation dans leur basilique de la sainte dépouille. Aussi bien, seul ce quantième de mois avait pour eux une importance, et majeure parce que liturgique. C’est, on l’a vu, le 14 janvier qu’ils commémoraient liturgiquement l’anniversaire de la translation des reliques de sainte Foy d’Agen à Conques. C’est précisément ces mêmes dates de jour et de mois que donnent pour cette même translation le double récit de l’événement : In die nonodecimo – kalendis februariis, dit le versificateur de la Translation rimée ; XIX Kal. februarium die, écrit l’auteur de la Translation en prose (3). Sur ce point donc, pas de contradiction, encore moins de fantaisie : textes narratifs du transfert et textes liturgiques concordent. Ravi un 6 janvier, jour d’Epiphanie, c’est un 14 janvier que le corps de la sainte martyre Agenaise fut solennellement reçu à Conques.

En outre les deux récits de la translation fournissent un élément chronologique qui, bien qu’objet d’interprétations diverses, n’est pas pour autant à négliger : cette dernière est dite avoir eu lieu sous le règne d’un Charles qualifié de mineur – Carolus minor. L’un et l’autre textes ajoutent que ce Charles fut dépossédé de son trône, et la Translation en prose précise qu’il le fut de par une conjuration inique des grands du royaume qui élevèrent à sa place le duc d’Aquitaine Eudes (4). MM. Ferdinand Lot et Léon Levillain ne /19/ doutent pas que les auteurs des deux relations n’aient voulu désigner par cette épithète de minor, accolée au nom de Charles, Charles III le Simple qui, de fait, est ainsi qualifié par Adhémar de Chabannes (1) ; mais en réalité il s’agirait, pour M. Lot comme pour M. Levillain, du fils de Charles le Chauve, Charles l’Enfant, roi d’Aquitaine de 855 à 866, ce qui les amène à dater la translation, M. Lot du 14 janvier 865 ou 866, M. Levillain du 14 janvier 866 (2).

Quant à M. le chanoine Angély, il semble bien, à notre sens, être dans le vrai lorsqu’il identifie ce Charles qualifié de minor, sous le règne duquel eut lieu la translation, avec l’empereur Charles le Gros. Très pertinemment il écrit : « [Charles l’Enfant] n’est jamais monté sur le trône de France et n’en a pas pu être dépossédé. Un seul roi de France, du nom de Charles, a été déposé par les Grands en suite d’une « conjuration inique », rappelée par la Translation en prose. Et c’est Charles le Gros, que l’acte de déposition de 887 flétrit sous le nom de « Minor », avec le sens de « velléitaire » et non de « jeune ». Pour éviter toute erreur, la translation en prose précise que c’est Eudes qui le remplaça » (3).

A ces justes observations on ajoutera une remarque confirmative qui semble avoir échappé aux critiques qui ont discuté de pareille identification. Un texte local, le récit de la translation de saint Antonin, est daté du 19 juin, an de l’Incarnation 887, Charles Mineur, roi de France régnant – Carolo Minore, Francorum rege regnante (4). Il ne peut faire doute qu’il ne s’agisse de l’empereur Charles le Gros effectivement roi de France de 884 à 887. On sait les réserves qu’imposent l’historicité de ce texte. On n’en veut retenir ici-même que l’épithète de minor sous laquelle était très anciennement connu en Rouergue l’empereur Charles le Gros.

Reste à examiner si cette donnée de règne de Charles le Gros pour la translation de sainte Foy n’est pas contredite par les données du cartulaire de Conques. Une charte de ce dernier, la donation de l’église de Saint-Cyprien, indubitablement du 30 juillet 883 fournit un indiscutable terminus ad quem (5) : à cette date la translation était chose faite ; les restes de la sainte martyre Agenaise reposaient à Conques. Depuis combien de temps? Une charte du même cartulaire donnerait un terminus a quo s’il était possible de la dater avec /20/ certitude et précision. C’est l’acte de donation de la villa de Bauton, en Sévéraguais, par le puissant comte d’Auvergne-Rouergue Bernard Plantevelue – ne va-t-il pas jusqu’à se dire dans ce document comte par la grâce de Dieu : gratia Del comes – et sa femme Ermengarde (1). Daté du 21 juillet de la 7e année de Charles, roi des Francs et des Lombards – XII Kalendas augustas, anno VII regnante Karolo rege Francorum et Longobardorum –, il ne fait pas mention au nombre des reliques de l’abbaye de celles de sainte Foy. Sa datation présente de réelles difficultés. On ne peut retenir, même avec la correction de rege Longobardoram en rege Aquitanorum, celle de M. F. Lot, la mention de roi des Francs écartant Charles l’Enfant avec lequel cet érudit a voulu identifier le Carolus de l’acte (2). Celle de M. L. Levillain, reconnaissant dans ce prince Charles le Chauve, n’est guère plus soutenable (3) ; aussi bien cet érudit devait-il l’abandonner dans la suite pour adopter celle de l’Histoire de Languedoc (4). Dom Vaissete sic; Dom Joseph Vaissète o Vaissette 1685 – 1756, monaco benedettino ed erudito Dom Vaissete, en effet, voyait dans ce roi des Francs et des Lombards Charles le Gros (5) et après lui G. Desjardins et Aug. Molinier ont admis cette manière de voir (6). Il y a chance qu’ils soient dans le vrai et plus qu’ils ne croyaient.

Sans doute Charles le Gros, roi d’Italie en 879, empereur en 881 n’a été roi de France et d’Aquitaine qu’après la mort de Carloman de 885 à 887, date de sa déposition. Mais Léonce Auzias dans ses solides travaux d’histoire carolingienne méridionale a décelé un grave dissentiment survenu en novembre 880, au cours du siège de Vienne, entre Carloman et Bernard Plantevelue, à telle enseigne que ce dernier, se départant de sa fidélité envers son souverain légitime, aurait reconnu comme tel Charles le Gros (7). Des chartes de régions soumises à l’autorité de ce comte : Lyonnais, Auvergne, Brivadois, Carcasses, à partir de 881, donc du vivant même de Carloman, sont datées par le règne ou l’empire de Charles le Gros (8). La donation de Bauton au cartulaire de Conques, émanant de Plantevelue en personne, rentre dans cette catégorie et, par suite, a dû être faite entre la levée du siège de Vienne, époque du désaccord entre Bernard et /21/ son roi, soit novembre 880, et janvier 883, date où les reliques de sainte Foy étaient sûrement présentes à Conques, c’est à savoir un 21 juillet de l’an 881 ou 882. Il est difficile de faire choix entre ces deux années dans l’impossibilité où l’on est de raccrocher les sept années données à un point de départ acceptable de règne. Au surplus, de par la discordance des éléments chronologiques ce chiffre vii a chance d’être erreur de copiste. On ne se hasardera pas à une correction toujours plus ou moins arbitraire, mais on retiendra que la translation des restes de sainte Foy d’Agen à Conques eut lieu, ou le 14 janvier 882 si la charte est de 881, ou le 14 janvier 883 si la charte est de 882.

De toute façon Translation en vers, Translation en prose, cartulaire de l’abbaye sont d’accord pour placer le pieux larcin sous le règne de ce Charles dit Minor, roi des Francs et des Lombards et qui n’est autre que Charles le Gros, reconnu dans les comtés administrés par Bernard Plantevelue, roi de France et d’Aquitaine du vivant même de Carloman. On conçoit alors l’embarras, deux siècles plus tard, de l’auteur de la Chronique de Conques; dans l’ignorance de cette conjoncture et mis en présence de ce Carolus minor que lui fournissaient textes et traditions du monastère, il n’hésitait pas, trompé par la Chronique d’Adhémar de Chabannes, dont au surplus l’auteur de la Translation en prose semble bien lui aussi s’être inspiré, à identifier ce souverain avec Charles III le Simple (1). On concluera que, si fantaisie il y a quelque part, ce n’est point dans les datations du transfert par les moines de Conques, mais bien dans les assertions de M. le chanoine Angély.

Précisément ce dernier déclare hautement cette date de 882 ou 883 impossible parce que trop tardive (2). D’une part, en effet, à cette époque, les églises d’Agen, et tout particulièrement celle de sainte Foy située dans un faubourg – in suburbio – de la ville, étaient depuis plus de six lustres complètement détruites par les Normands et d’autre part le corps de sainte Foy, tout comme celui de saint Caprais, avait, en prévision des invasions, été caché aux flancs d’un coteau dominant la ville. Les émissaires de Conques, si tant est qu’ils aient été envoyés, ne purent donc trouver qu’une basilique en ruine, les clercs la desservant dispersés par la tourmente et la sainte dépouille, objet de leur convoitise, hors d’atteinte en lieu sûr. Tel est le roman /22/ échaffaudé par M. le chanoine Angély pour prouver que l’enlèvement des restes de sainte Foy n’est à son tour que pur roman.

Et d’abord, des invasions normandes en Agenais, tout comme pour la plupart des provinces d’Aquitaine, on ne sait, autant dire, à peu près rien. C’est la constatation que fait très loyalement un érudit local de classe, M. le chanoine Marboutin, dans cette même Revue de l’Agenais : « Les invasions des Normands en Agenais, écrit-il, sont peu connues. Ces intrépides et alertes pillards n’ont laissé dans le pays aucune trace de leur passage. Les vieilles chroniques mentionnent à peine leurs courses dans nos contrées » (1).

M. le chanoine Angély, lui, prétend en savoir plus long et cela grâce à l’étude de L. Auzias sur l’Aquitaine carolingienne. Vérification faite, des neuf références données au travail précité, aucune ne fait la moindre allusion à une dévastation quelconque d’Agen ou de l’Agenais par les Normands. Aussi bien, il est un ouvrage classique en la matière : celui de Vogel, Les Normands et l’Empire Franc, jusquà la fondation de la Normandie, 799-911 (2), que complètent très utilement les deux études de F. Lot : La grande invasion normande de 856-862 et La Loire, l’Aquitaine et la Seine de 862 à 866, enfin l’article de M. J. Calmette : Le siège de Toulouse par les Normands en 862 (3). C’est en vain qu’on chercherait dans ces excellents travaux une mention quelconque de ces pirates à Agen et en Agenais.

M. le chanoine Angély, il est vrai, croit pouvoir faire état d’un « Mémoire » tardif – il est du xve siècle – d’un évêque d’Agen, Pierre Bérard (1461-1477) affirmant la ruine de sa ville épiscopale et de sa cathédrale par les Normands, vers 844, sous un de ses très problématiques prédécesseurs, Gondolanus (4), renseignement qui se trouverait confirmé par les dires d’un érudit local du xviiie siècle, Labenazie (5). Mais il omet, comme par hasard, de mentionner que ce même Labenazie « qui a manipulé, lui aussi nos vieilles archives pour notre meilleur profit », – canonicus dixit – ne manque pas de faire remarquer que « par dévotion aux reliques des martyrs et aux /23/ églises qui leur étaient consacrées les Normands avaient conservé ces édifices ». Donc, si tant est que l’on puisse accorder quelque crédit à ces données si postérieures aux événements qu’elles mentionnent, il en ressort que la basilique de sainte Foy fut épargnée par ces « païens du Nord ». Et, alors même qu’on admettrait sa destruction au cours d’un raid normand de 844, on peut très vraisemblablement supposer qu’une quarantaine d’années plus tard, en 882 ou 883, elle était à nouveau debout et que, comme avant le désastre, les clercs de sainte Foy y avaient repris leur garde auprès du tombeau de leur sainte martyre.

Quant à la mise en lieu sûr, devant le danger normand, au coteau de Sainte-Croix dominant Agen, des trésors et particulièrement des corps saints de la ville, M. le chanoine Angély n’apporte comme unique preuve de ce qu’il avance qu’un passage de la Chronique Saintongaise, autrement connue sous le titre de : Tote l’istoire de France. C’est, en effet, une manière de résumé de l’histoire de France à l’usage des laïcs de langue d’oil, compilé, croit-on, dans la première moitié du xiiie siècle (1). On y lit ceci : Li trésor d’Agent et d’Ageneiz fut seveliz en una montagnia qui est apelee Calabre a Saincte Croiz en un cruzel, lai ou Rollanz fut chevaliers quant il ot desconfi Omont. On éprouve quelque surprise à voir M. le chanoine Angély, lui si sévère pour les récits de la translation de sainte Foy, faire grand état de ce texte, résidu, pour ne pas dire détritus, de légendes et de romans épiques. Mais constatation autrement pénible : si tant est qu’on puisse faire le moindre fond sur pareille rhapsodie, on peut affirmer que parmi li trésor d’Agent seveliz en una montagnia apelee Calabre ne se trouvait pas la dépouille mortelle de sainte Foy. Qui nous l’assure? La Chronique Saintongeaise elle-même. On y lit en effet en toutes lettres, bien avant le paragraphe précité, cet autre paragraphe dont M. le chanoine Angély se garde bien de souffler mot : Empres cestui ìì[òòKarl li Chausìì]òò regna en France si filz Loois li Baubes, En ceu temps fu emblez de la cité d’Ageneis li cors santa Feu la vergin e fu portez au mostier de Conchas, – Après celui-ci ììòò[Charles le Chauveìì]òò, son fils Louis le Bègue régna en France. En ce temps là le corps de sainte Foy, la vierge, fui enlevé de la ville d’Agen et fut porté au monastère de Conques. On comprend fort bien que M. le chanoine Angély n’ait /24/ pas eu le courage, et pour cause, de placer sous les yeux du lecteur le fragment auquel il renvoie, le dernier des travailleurs de province n’eût osé en faire historiquement état. Mais la plus élémentaire probité historique lui faisait un devoir de signaler l’autre fragment et d’en tirer les conclusions qui s’imposent. On s’abstiendra par déférence confraternelle et canoniale de juger pareil procédé. Mais on ne peut pas ne pas dire qu’il est bien propre à disqualifier irrémédiablement aux yeux des érudits son auteur.

2º Prétendus récits de folklore religieux. – A en croire M. le chanoine Angély, la double relation, celle en vers et celle en prose, de la translation de sainte Foy d’Agen à Conques, ne serait qu’un produit de cette « littérature romancée » qui ressortit « au folklore religieux » (1). Le prototype de ces histoires d’enlèvements furtifs de corps saints dans le Midi ne serait autre que le récit de la translation des reliques de sainte Fauste apportées de Gascogne à Arnac, cella Limousine de l’abbaye de Solignac (2). Les textes de Conques ne seraient qu’une démarcation, une adaptation et, pour tout dire, un plagiat du texte narrant le transfert du corps de sainte Fauste. Et l’auteur de cette inédite assertion, dans l’impossibilité de montrer le moindre emprunt littéral entre le prétendu modèle et la prétendue copie, de mettre en parallèle sur deux colonnes, à fin de comparaison, une brève analyse de son crû des deux récits de larcin, celui de sainte Fauste et celui de sainte Foy. Analyse tendancieuse, s’il en fût, parce que se bornant à accuser les ressemblances et taisant les différences ; analyse qui, de surcroît, n’est qu’un tissu d’erreurs, à telle enseigne qu’on peut se demander si l’auteur s’est donné la peine de lire avec le minimum d’attention requise les documents en question. Voici au surplus et à simple titre d’échantillons quelques-unes de ces contre-vérités :

1º Il est dit nulle part dans la Translatio S. Faustae que le moine ravisseur Aldarius « séjourne dans le Fezensac, se fait bien voir des habitants ». Mais il est dit qu’Aldarius erra quelques temps en Gascogne à la recherche de reliques à emporter et que, découragé, il s’apprêtait à revenir chez lui lorsque se présenta l’occasion propice d’enlever le corps de sainte Fauste, ce qu’il fit sans tarder (3).

/25/

2º Il est dit nulle part dans la Translatio S. Faustae qu’Aldarius « fait violence au tombeau qui résiste à ses efforts, qu’il l’ouvre par effraction ». Mais il est dit qu’en tremblant, mais avec confiance Aldarius déplaça le couvercle du sarcophage où la sainte dépouille reposait (1).

3º Il est dit nulle part dans la Translatio S. Faustae qu’Aldarius « met le corps dans un sac », mais il est dit qu’il l’enveloppa dans des linges spéciaux (2).

4º Il est dit nulle part dans la Translatio S. Fidis qu’Arinisdus, le moine de Conques ravisseur, « une nuit fait violence au tombeau ». Mais il est dit, et de façon qui ne laisse place au doute, que l’enlèvement eut lieu en plein jour, après la messe solennelle, tandis que les clercs se trouvaient réunis au réfectoire pour le repas – prandium – qui se prend au milieu du jour (3).

Aussi bien, afin de mettre le lecteur à même de juger de cette prétendue parenté entre les deux récits, on présentera à son tour de ces deux Translations une analyse comparative qu’on ne pourra taxer de tendancieuse, n’étant que la traduction de celle donnée par les → Translatio metrica Bollandistes en marge de leur édition de ces deux textes (4).

Translation de Sainte Fauste Translation rimée de Sainte Foy
Tandis que les Normands dévastaient l’Aquitaine, Arnaud, duc de Gascogne, souvent vainqueur, à la fin vaincu, ami des religieux de Solignac et moine de désir, persuade ces derniers d’enlever des reliques de Gascogne ; pour ce faire, ils envoient Aldarius qui, après nombre d’autres, trouve les reliques de sainte Fauste, les enlève nuitamment, /26/ tandis qu’un formidable coup de tonnerre terrasse ses compagnons. Un fleuve débordant à la suite de pluies et dangereux est par l’assistance de sainte Fauste traversé sans danger par Aldarius. Les moines exilés de Solignac accourent au devant des saintes reliques ; des cierges s’allument miraculeusement, la pluie est détournée. Les reliques de sainte Foy découvertes et déposées par saint Dulcide dans un magnifique tombeau attiraient par leurs miracles un grand concours de peuple et cela pour la gloire de la ville d’Agen. Situation du monastère de Conques, ses origines et sa restauration par Louis le Pieux. Les moines de Conques, désireux d’acquérir les reliques de sainte /26/ Foy, envoient Ariviscus à Agen qui, établi gardien du sanctuaire, enlève furtivement le corps de sainte Foy et avec son butin prend la fuite. Tandis que les Agenais déplorent vivement cette perte, quelques uns se lancent à la poursuite du fugitif mais en sens contraire. Enfin d’autres, ayant pris la bonne voie et se trouvant en présence du ravisseur, ne le reconnaissant pas, retournent à Agen sans résultat. Un aveugle surnaturel­lement prévenu recouvre la vue. Les reliques sont intronisées à Conques le 14 janvier, sous le règne de Charles Mineur.

Au fond, les deux textes ne coïncident que par les seuls lieux communs inhérents à n’importe quel récit d’enlèvement, depuis celui de la Toison d’or jusqu’à celui de la Joconde. Le moyen de narrer des faits de cet ordre sans dire que quelqu’un est allé quelque part et a volé quelque chose? A cela près, se bornent les ressemblances entre la Translation de sainte Fauste et la Translation de sainte Foy.

Les sources de cette dernière sont pour autant à chercher ailleurs. Ce récit si circonstancié, où les traits originaux abondent, aux données chronologiques et topographiques précises – départ d’Agen un 6 janvier, arrivée à Conques le 14 janvier ; itinéraire : Agen, Lalbenque (1), Figeac, Conques – ne peut avoir pour origine que des données fournies par l’auteur même du rapt. C’est ce que reconnaît M. F. Lot qui écrit : « L’auteur en vers, ou plutôt l’auteur en prose n’a pas inventé de toute pièce son récit de la translation des reliques de sainte Foy » (2). Quant aux prétendues invraisemblances relevées par M. le chanoine Angély, ce sont choses d’appréciation trop subjective pour être historiquement discutées (3).

/27/ En fait, le seul problème critique qui se pose touchant ces textes : Translation en vers, Translation en prose, est celui de la détermination de leur rapport. Peut-être nous sera-t-il donné quelque jour de l’aborder en détail. Il suffira de dire ici-même qu’à notre sens dut être rédigée à une date assez proche de l’événement et sur les renseignements fournis par le moine ravisseur une relation en prose du transfert qui peu après fut rimée pour les besoins liturgiques. Ce primitif récit en prose aurait été remanié et complété vers le second quart du xie siècle par le religieux de Conques continuateur du Livre des miracles de Bernard d’Angers et correcteur de la Passioin de Sainte Foy afin d’être inséré dans cette compilation dédiée à la gloire de la sainte martyre et du lieu qui désormais conservait sa dépouille mortelle, et qui avait nom Panaretos ou Livre de toutes les merveilles (1). Il ne semble pas impossible, au moyen des deux textes qui restent, de reconstituer cette première Translation en prose qui n’est point parvenue jusqu’à nous.

En tout cas, et on ne saurait trop insister sur cette remarque, alors même que l’appréciation que M. le chanoine Angély porte sur ces récits devrait être tenue pour avérée, quand bien même ces deux textes devraient être classés parmi les documents de « folklore religieux », le fait lui-même de la translation des reliques de sainte Foy d’Agen à Conques n’en serait point pour autant infirmé, étayé qu’il est par cet ensemble de témoignages objectifs que constituent les sources diplomatiques liturgiques et archéologiques précitées. Seules resteraient sujettes à caution les circonstances et les modalités du transfert.

3º Prétendue possession ininterrompue du corps de sainte Foy par les Agenais. – En finale, M. le chanoine Angély s’efforce de prouver « la possession authentique et constante du corps de la martyre par les Agenais » et ce jusqu’à sa profanation par les protestants en 1561 (2). Pour ce faire il reprend le mythe épique de l’enfouissement des trésors d’Agen et de l’Agenais dans la montagne appelée « Calabre », comme si le même document ne spécifiait pas qu’à cette date les reliques de sainte Foy ne se trouvaient plus à Agen mais à Conques même (3). Dès lors tout ce qu’il avance sur les transferts de corps saints dans une église, alors collégiale, aujourd’hui cathédrale, de /28/ l’intérieur de la ville, n’intéresse plus les reliques de sainte Foy absentes d’Agen.

Quant au texte qu’il met en avant d’un abbé de Saint-Gall, Ulrich d’Eppenstein, venu à Agen, dans la première moitié du xie siècle, chercher des reliques de sainte Foy, dans les Glanures de Tamizey de Larroque données en référence il n’est question ni de sainte Foy, ni de ses reliques (1). M. le chanoine Angély a tout simplement confondu cet Ulrich, abbé de Saint-Gal sic. Con questa grafia si indica un comune francese del dipartimento di Lozère; ma penso che sia una semplice svista grafica, e che l’autore intenda anche qui il famoso monastero svizzero Saint-Gal avec un autre abbé de Saint-Gall, Voldalric, qui, s’il faut en croire le chroniqueur Burkard, serait venu, dans la seconde moitié du xie siècle, chercher à Agen des reliques de sainte Foy (2). Mais pareil récit avec ses détails d’impossibilité de construire le monastère – ce qu’on bâtissait la veille était trouvé le lendemain écroulé –, avec son apparition à l’abbé d’un mystérieux étranger lui faisant savoir qu’il n’arrivera à élever son abbaye que s’il se procure une relique de sainte Foy, constitue le document type de folklore religieux. Il ne saurait être question d’en faire état. Sont ensuite présentés divers textes tardifs – testament de 1482, inventaire de 1511 de châsses et de reliquaires dont on ne connaît que l’étiquette et rien de la nature du contenu – mais qui attestent qu’en fait tout culte de sainte Foy n’avait pas totalement disparu de sa ville natale après le départ de sa dépouille mortelle et même qu’Agen pouvait posséder des fragments de cette dernière. De tels faits ne présentent rien d’insolite et n’infirment en rien la réalité du transfert à Conques.

Car enfin, ce que le moine ravisseur n’avait pu emporter en même temps que les reliques, c’était leur emplacement même, objet lui-même de culte pour les populations médiévales, c’était surtout le sarcophage qui les avaient contenues et dont les fragments qu’on en détachait, les poussières de marbre qu’on en raclait, les brandea qui le touchaient, l’huile des ampullae qui le veillaient de leur flamme constituaient en ces temps autant de reliques. Enfin dans sa précipitation, Arinisdus avait fort bien pu laisser au fond ou dans quelque coin de la tombe quelque parcelle ou cendre d’ossements.

Que si ces raisons ne paraissent pas suffisantes à M. le chanoine Angély pour expliquer cette survie de culte et cette présence de reliques de sainte Foy à Agen après le départ de ces dernières pour Conques, on se permet d’attirer son attention sur ces très pertinentes observations d’un maître en critique hagiographique, le P. Bollandiste Hippolyte /29/ Delehaye : « Il y a lieu de penser que, dès cette époque [pontificat de Grégoire IV (827-842)], on a vu se produire un phénomène psychologique qui s’est bien souvent renouvelé depuis ; après l’enlèvement d’un corps saint, on continue à agir comme s’il était resté en place. Le public a oublié, s’il les a jamais connues, les circonstances de la translation ; des manœuvres intéressées ont peut-être aidé à en effacer le souvenir. Qui sait? Des substitutions coupables, plus aisées à pratiquer à ces époques reculées qu’elles ne seraient de notre temps, ont achevé de dérouter l’opinion. De tout cela il y a des exemples. Le peuple se laisse facilement persuader que le Saint n’a pas quitté son sanctuaire » (1).

En conclusion, M. le chanoine Angély se targue d’avoir découvert « la raison valable aux prétentions inadmissibles » de Conques et rien moins que « l’origine de la légende avouée ingénuement » par l’auteur de la Translation rimée (2). De fait, ce dernier rapporte que les religieux de Conques saisis d’admiration pour les prodiges opérés à Agen par sainte Foy ne tardèrent pas à déclarer combien ils seraient heureux de posséder les reliques de cette sainte martyre (3). Dans ce désir de possession, M. Angély voit, « la raison d’une tumulation supposée par un prétendu larcin » (4). Comme si pareil sentiment n’était pas le mobile ordinaire et banal de tout vol, bien plutôt que celui d’une prétendue imposture. Comprenne qui pourra!

Ainsi s’avère, en dépit du ton tranchant avec lequel ils sont présentés, la légèreté et, pour tout dire l’inanité des arguments mis en avant pour tenter d’énerver l’authenticité du fait du transfert d’Agen à Conques de la dépouille mortelle de sainte Foy : 1º la datation du larcin ne présente ni fantaisie, ni contradition, ni, à une année près, impossibilité, l’affirmation de cette dernière ne reposant que sur le témoignage on ne peut plus sujet à caution et volontairement tronqué de la Chronique Saintongeaise qui, en fait, énonce exactement le contraire de ce qu’on prétend lui faire dire ; 2º les récits de la translation de sainte Foy n’ont rien à voir avec celui de la translation de sainte Fauste, encore moins avec des documents de folklore religieux ; 3º c’est on ne peut plus gratuitement qu’est affirmée la possession /30/ ininterrompue du corps de sainte Foy par les Agenais. Cette possession, une masse imposante de témoignages parfaitement sincères, d’ordre diplomatique, liturgique, archéologique, littéraire attestent, on ne peut plus clairement, on ne peut plus solidement, qu’elle fut interrompue l’an de grâce 882 ou 883 au profit de l’abbaye de Conques-en-Rouergue.

Aussi bien tout esprit non prévenu ne peut, si tant est que la certitude historique repose sur le témoignage de documents dûment contrôlés et critiqués, que souscrire à l’affirmation qui se lit au bas du plus ancien Catalogue des reliques qui se trouvent dans l’église collégiale de Sainte-Foy de Conques : Corpus gloridsissimae virginis et martyris Fidis ibidem certissime requiescit – Le corps de la très glorieuse vierge et martyre Foy repose ici très certainement (1).

Rodez, 14 janvier 1953, au jour anniversaire
de la translation des reliques de sainte Foy
d’Agen à Conques.

Abbé Louis Bousquet.

[Note a pag. 1]

(1) Mabillon, Annales ordinis S. Benedicti, II, 401; IV, 405, 648 etc.; – Gallia christiana, I, col. 236; – Acta SS. Boll., oct. III, 294-299; – Histoire de Languedoc, (édit. orig.), t. II, p. 105 et suiv. Torna al testo ↑

(2) G. Desjardins, Cartulaire de l’abbaye de Conques, Introd. p. IX-XI. – Aug. Molinier, Les sources de l’Histoire de France, Introd. génér., p. LVII, no 84. – Abbé Bouillet, Liber miraculorum Sancte Fidis, Préface, p. VI-VII. – Louis Saltet, Histoire de l’Eglise (Paris, 1913), p. 115. – Pour F. Lot. et L. Levillain, cf. infra. Torna al testo ↑

[Note a pag. 2]

(1) Pour le Congrès de Cahors, cf. Annales du Midi, t. 62 (1950), fasc. 3, p. 294-296, Compte rendu de M. Higounet. – Pour le mémoire de M. Angély, cf. Revue de l’Agenais, 76e année, 3e et 4e bulletins trimestriels (1950), p. 91-102. C’est le bulletin de la Société Académique d’Agen qui « n’accepte pas la solidarité des opinions émises dans les articles de la Revue ». Torna al testo ↑

(2) Disons de suite que dès les premières lignes de ce mémoire le lecteur est mis en défiance par une confusion regrettable et un grossier barbarisme. Le corps de St Vincent d’Agen est dit « prétendûment tumulé à Figeac ». L’auteur a simplement confondu St Vincent (Vincentius) et St Vivien (Bibianus). D’autre part sur le substantif Rouergue, il forge le vocable rouergois maintes fois répété. N’importe quel dictionnaire lui aurait donné rouergat. Torna al testo ↑

[Note a pag. 3]

(1) Cf. Cartulaire de l’abbaye de Conques en Rouergue, publié par Gustave Desjardins (Paris, 1879, in-8º) et du même, Essai sur le Cartulaire de l’abbaye de Sainte Foi de Conques en Rouergue (ixe-xiie siècles), dans Bibliothèque de l’Ecole des Chartes, t. XXXIII (1872), 254-282. Torna al testo ↑

(2) « Locum sacrum qui situs est in pago Rutenico, in honore et reverentia dommi et salvatoris nostri Jhesu Christi, ex reliquiis ejus diligatus seu et sanctae Mariae matris ejus et ex reliquias beati Petri principis apostolorum, cui vocabulum est Concas ». Desjardins, Cartulaire, no 1, p. 1. Torna al testo ↑

[Note a pag. 4]

(1) « Sacrosancte ecclesiae sancto Salvatori et sancte Petri vel aliorum Sanctorum Conchas monasterio ». Desjardins, Cartulaire, no 212, p. 179. Torna al testo ↑

(2) Desjardins, Cartulaire, no 4, p. 5. Torna al testo ↑

(3) Desjardins, Cartulaire, no 108, p. 99. Torna al testo ↑

(4) Desjardins, Cartulaire, no 409, p. 302. Torna al testo ↑

(5) Desjardins, Cartulaire, no 218, p. 184, etc. Torna al testo ↑

(6) Desjardins, Cartulaire, no 222, p. 187; no 92, p. 86; no 91, p. 85 etc. Torna al testo ↑

[Note a pag. 5]

(1) Desjardins, Cartulaire, no 46, p. 48. Torna al testo ↑

(2) Desjardins, Cartulaire, no 389, p. 288. Torna al testo ↑

[Note a pag. 6]

(1) Desjardins, Cartulaire, no 49, p. 50. Torna al testo ↑

(2) Desjardins, Cartulaire, no 52, p. 52. Torna al testo ↑

(3) « Supradictum vero Translationis diem devotissima Christi plebs pro virginis veneratione aeternaliter sibi celeberrimum et in omni verae fidei laetitia praecipuum elegit, quem annua observantia universalis terrae illius christianitas ex tunc et modo, et in futurum in Dei laudibus, totoque spirituali tripudio, omnigenis deifici cultus ornamentis ornant, atque festivum recolunt. Ab illo ergo die usque hodie quamplurima populorum multitudo ad limina praefati templi pro sanctae Christi Martyris reliquiis visitandis undique conveniunt ita ut... etc. ». Acta SS. Boll., oct. III, p. 298. Torna al testo ↑

[Note a pag. 7]

(1) Sur ce manuscrit que M. E. Hoepffner, professeur à l’Université de Strasbourg, a eu le mérite de reconstituer, cf. La chanson de Sainte Foy, t. I, par Ernest Hoepffner, Paris, 1926, in-4º, p. 3-12. Torna al testo ↑

(2) Cet office a été publié en entier par Bouillet et Servières, Sainte Foy, vierge et martyr, Rodez, 1900, in-4º, p. 643-655. Torna al testo ↑

(3) Publiée également par Bouillet et Servières, op. cit., p. 690-691. Torna al testo ↑

(4) Sur ce manuscrit dont on ignore le sort, cf. C. Couderc, Le bréviaire de François d’Estaing et les plus anciens livres liturgiques du diocèse de Rodez et de Vabres, Besançon, 1929, in-8º, p. 26-27. Torna al testo ↑

(5) Textes publiés par Bouillet et Servières, op. cit., p. 638 et 639-640. Torna al testo ↑

[Note a pag. 8]

(1) Desjardins, Cartulaire, no 522, p. 371-372. Torna al testo ↑

(2) Cf. C. Couderc, op. cit., p. 27. Torna al testo ↑

(3) Offices publiés par Bouillet et Servières, op. cit., p. 640-641. Torna al testo ↑

(4) Publiée par Bouillet et Servières, op. cit., p. 641-642. Torna al testo ↑

(5) Hippolythe Delenaye, Cinq leçons sur la méthode hagiographique. Bruxelles, 1934, p. 13 et suiv. Torna al testo ↑

[Note a pag. 9]

(1) Il y a chance qu’il ne faille voir dans cet incident qu’un prétexte pour soustraire les reliques à un nouveau rapt. Torna al testo ↑

(2) Acta SS. Boll., oct. III, p. 277 « Juxta predicti Sancti ac Summi Salvatoris Jesu Christi altaris latus posterius, ex omni rutilantis auri gemmarumque coruscantium pompa, mirifice machine thecam fabricari conati sunt, sub qua dignissima virgo obsigillata feliciter in Christo requiescit ». Torna al testo ↑

(3) Liber miraculorum Sancte Fidis, édition Bouillet, Paris, 1897, p. 77 : « Verum quia eadem medietas psallendi assiduitate frequentior habetur, illuc ex proprio loco sancte martiris preciosa translata sunt pignera ». Torna al testo ↑

[Note a pag. 10]

(1) Cf. L. Bréhier, La cathédrale de Clermont au xe siècle et sa statue d’or de la Vierge, dans la Renaissance de l’Art Français, avril 1924, p. 205. Torna al testo ↑

(2) Martène et Durand, Thésaurus novus anecdotorum, t. III, Chronicon monasterii Conchensis, col. 1387-1390 : « Domnus Stephanus... beate Fidei gloriosae virginis et martyris [ ] ut fertur auctor extitit ubique partem ipsius capitis venerabiliter reposuit ». Suppléer [Majestatis]. Torna al testo ↑

(3) Cf. Procès-Verbaux authentiques et autres pièces concernant la reconnaissance des reliques de Sainte Foy recueillis et coordonnés par Mgr J.-Ch. E. Bourret, Rodez, 1880. Torna al testo ↑

(4) Marcel Aubert, L’église de Conques, Petites monographies..., Paris, 1939. Torna al testo ↑

[Note a pag. 11]

(1) Cf. B. de Gauléjac, Notes sur l’histoire de Conques pendant les guerres de Religion, dans Mémoires de la Société des Lettres, Sciences et Arts de l’Aveyron, t. XXIII (1935), p. 473-486. Torna al testo ↑

(2) E. de Barrau, Découverte d’un reliquaire à Conques (avril 1875), dans Revue Religieuse de Rodez et de Mende, 24 mai 1875, p. 237. Torna al testo ↑

(3) Procès-verbaux authentiques et autres pièces concernant la reconnaissance des reliques de Sainte Foy. On y trouvera une reproduction des phylactères et du fragment d’os gravé. Torna al testo ↑

[Note a pag. 12]

(1) Textes publiés dans Acta SS. Boll., oct. III, col. 289-292 et 294-299 Torna al testo ↑

(2) Dans le récit en vers il est nommé Ariviscus, dans le récit en prose Arinisdus. M. le chanoine Angély s’étonne que les moines de Conques n’aient pas su conserver le nom exact de leur confrère, comme s’il ignorait les déformations auxquelles sont particulièrement exposés les noms propres dans les transcriptions manuscrites Torna al testo ↑

[Note a pag. 13]

(1) Liber miraculorum sancte Fidis, édit. Bouillet, Paris, 1897, in-8º, p. 2. Torna al testo ↑

(2) Liber miraculorum (édit. Bouillet), p. 53. Torna al testo ↑

(3) Liber miraculorum (édit. Bouillet), p. 1. Torna al testo ↑

(4) Liber miraculorum (édit. Bouillet), p. 86. Torna al testo ↑

(5) Louis Saltet, A trois cents ans de distance, les étapes extrêmes d’une recherche historique, préface d’Histoire des Evêques de Rodez, par A. Bonal, édit. J.-L. Rigal, p. VI. Torna al testo ↑

[Note a pag. 14]

(1) Liber miraculorum (édit. Bouillet), p. 198. Torna al testo ↑

(2) Gallia Christiana, t. II, col. 896. Torna al testo ↑

(3) Propre d’Agen de 1727, 6 oct. lect. VI ; cf. aussi R. P. Cortade, Les sept Saints titulaires de l’Agenois, Agen, 1664. Torna al testo ↑

[Note a pag. 15]

(1) J. Bédier, Les. Légendes épiques, Paris, 1921, in-4º, t. III, p. 95. Torna al testo ↑

(2) J. Viellard, Le Guide du Pèlerin de Saint-Jacques de Compostelle, Mâcon, 1938, in-8º : « Demum beate Fidis virginis et martiris, corpus preciosissimum in valle que vulgo dicitur Conquas honorifice a xpistianis sepelitur ; super quod basilica obtima a xpistianis fabricatur, in qua ad Domini decus usque hodie beati Benedicti regula summopere custoditur; incolumibus et infirmis beneficia multa largiuntur; ante cujus fores obtimus fons ultra quam dici fas est mirabilis habetur ; cujus festivitas II non. octobris colitur », p. 50 et 51. On remarquera que le Guide ignore complètement l’inhumation de la sainte à Agen. Torna al testo ↑

(3) « Subséquente vero tempore, Carolo minore, Ludovici filio, in regnum Francorum sublimato, ab urbe Aginnensi cum corpore beati Vincentii furtim sublatum est corpus gloriosissimae virginis et martyris Fidis, et ad illud Conchense coenobium /16/ translatum, ubi digne et honorifice prope altare Salvatoris Domini est reportatum ». Martène, Thés. Anecd., III, col. 1388. Torna al testo ↑

[Note a pag. 16]

(1) Cf. J. Salvat, La Chanson de Sainte Foi, dans Bullet. de Litt. Ecclés. publié par l’Institut Catholique de Toulouse, 1948, no 3, p. 191, note 84. Il y a chance que la Chanson ait vu le jour en Rouergue, dans un centre important du culte de sainte Foy, distinct de Conques. On aura quelque jour occasion de le montrer. Torna al testo ↑

(2)

Puis, par une nuit très obscure,

Deux moines y firent une ouverture.

En tirèrent le corps avec grande gentillesse.

A Conques ils l’ont, sainte et pure,

Et lisent cela en écriture.

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(3)

Bien est heureux cet endroit,

Où Dieu amène si riche sainte

Car il fait par elle de grands miracles,

Des plaids très jolis et de menus jeux.

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[Note a pag. 17]

(1) La prétendue tumulation de sainte Foy d’Agen à Conques, p. 102, note 52. Torna al testo ↑

(2) La prétendue tumulation de sainte Foy d’Agen à Conques, p. 91. Torna al testo ↑

[Note a pag. 18]

(1) Marc Bloch, La Société féodale. La formation des liens de dépendance, Paris, 1939, dans Bibliothèque de synthèse historique, p. 119. Voir les suggestives remarques du chap. II du Livre II : L’homme devant la nature et la durée. Torna al testo ↑

(2) Liber miraculorum sancte Fidis, édit. Bouillet, p. 3, 14, 15, 84 etc. Torna al testo ↑

(3) Acta SS. Boll., oct. III, p. 292 et 298. Torna al testo ↑

(4) Acta SS. Boll., oct. III, p. 292 : « Tunc in Francorum partibus – Regnabat minor Carolus – Quem post Franci de solio – Deposuerunt regio » dit la Translation rimée et la Translation en prose, op. cit., p. 298 : « Eodem quippe tempore, Carolo Minore, Francorum rege imperante, quem suae ditionis principes, inique adversus cum conjurantes, a solio regio ejecerunt et Ottoni, Aquitanorum duci, coronam regni imposuerunt et illum pro eo regnare elegerunt ». Torna al testo ↑

[Note a pag. 19]

(1) Adhémar de Chabannes, Chron. (édit. Chavanon), p. 138. Torna al testo ↑

(2) F. Lot, Sur la date de la translation des reliques de Sainte Foi d’Agen à Conques, dans Annales du Midi, XVI (1904), p. 502-508, et L. Levillain, Notes sur l’abbaye de Conques, dans Revue Mabillon, III (1907), p. 99-105. Torna al testo ↑

(3) La prétendue tumulation de Sainte Foy d’Agen à Conques, p. 101, n. 25. Torna al testo ↑

(4) Sur ce texte, cf. D. Vaissete, Hist. de Languedoc (édit. Molinier), IV, 843-844. Torna al testo ↑

(5) Desjardins, Cartulaire, no 4, p. 5. Torna al testo ↑

[Note a pag. 20]

(1) Desjardins, Cartulaire, no 153, p. 135. Torna al testo ↑

(2) F. Lot., op. cit., p. 507. Torna al testo ↑

(3) L. Levillain, op. cit., p. 106-107. Torna al testo ↑

(4) L. Levillain, Les Nibelungen historiques et leurs alliances de famille, dans Annales du Midi, no 197 (janvier 1938), p. 30, note I. Torna al testo ↑

(5) Histoire de Languedoc (édit. orig.), t. II, p. 14, et Preuves, p. 21, note. Torna al testo ↑

(6) Desjardins date l’acte du 21 juillet 882 et Molinier du 21 juillet 883. Torna al testo ↑

(7) L. Auzias, Les relations de Bernard Plantevelue avec les princes carolingiens de 880 à 885, dans Le Moyen Age, 3e série, t. IV (1933), p. 1 à 25. Du même, L’Aquitaine carolingienne, Toulouse, 1937, in-8º, p. 416 et suiv. Torna al testo ↑

(8) Sur ces chartes, cf. L. Auzias, op. cit., p. 13 et 14 et 417-418. Torna al testo ↑

[Note a pag. 21]

(1) « Subséquente vero tempore, Carolo Minore, Ludovici filio, in regnum Francorum sublimato... etc. ». Martène, Thés. Anecd., III, col. 1388. Torna al testo ↑

(2) La prétendue tumulation de Sainte Foy d’Agen à Conques, p. 93. Torna al testo ↑

[Note a pag. 22]

(1) J. Marboutin, Document sur une invasion des Normands en Agenais, dans Revue de l’Agenais, t. 29 (1902), p. 435 et suiv. Torna al testo ↑

(2) Walter Vogel, Die Normannen und das frankische Reich bis zur Gründung der Normandie, 799-911, Heidelberg, 1906, in-8º. Torna al testo ↑

(3) Les deux études de M. F. Lot ont paru dans Bibliothèque de l’Ecole des chartes, LXIX, 1re et 2e livraisons, janvier-avril 1908, et LXXVI, 6e livraison, novembre-décembre 1915; l’article de M. Calmette dans Annales du Midi, nos 115 et 116 (juillet-octobre 1917. Torna al testo ↑

(4) « On ne connaît aucun évêque d’Agen du viiie siècle ni du ixe, ni même du xe, jusque vers l’an 977 ». L. Duchesne, Fastes épiscopaux de l’ancienne Gaule, II, p. 64. Torna al testo ↑

(5) Recueil des trav. de la Société... d’Agen, t. VIII, p. 112. Torna al testo ↑

[Note a pag. 23]

(1) Cf. Auguste Molinier, Les Sources de l’Histoire de France, Ire partie, fasc. III, no 2523, p. 92-93. Publié par Bourdillon, d’Oxford, 1897, in-4º. Les fragments concernant l’Aquitaine ont été publiés dans l’Aquitaine, revue relig. archéol. et littér., 5e année, no 225 (22 nov. 1868) et no 227 (6 déc. 1868) par J. Mazuret, sous le titre : Ce que devinrent les trésors de nos églises et de nos saints à l’approche des Normands. Les passages intéressant l’Agenais ont été donnés et très pertinemment commentés par M. le chanoine Marboutin dans l’article : Document sur une invasion des Normands en Agenais de la Revue de l’Agenais, t. 29 (année 1902). Torna al testo ↑

[Note a pag. 24]

(1) La prétendue tumulation de Sainte Foy d’Agen à Conques, p. 94. Torna al testo ↑

(2) Historia translationis reliquiarum Sanctae Faustae... e Vasconia in cellam Asnensem, éditée par Labbe, Bibl. nova II, 525-527, par Acta SS. Boll., janv., I, 726-728, et par Mabillon, Acta SS. ord. S. Bened., IV, 2, 72-75. Torna al testo ↑

(3) « Sane cum multa Sanctorum pertransisset loca, et opportunum non vidisset, ut coeptum negotium explere potuisset, et jam ad propria redire decernerent, hi cum quibus ire decernebat tandem pervenerunt in territorio Fidenciaco, ubi ecclesia mirifice olim /25/ in honore S. Faustae virginis et martyris constructa et ab ipsis, quos supra taxavimus, paganis combusta fuerat... Quodam die crepusculo, transeunte noctis excursu, antequam res ab incolis ejusdem loci posset agnosci, paucis secum sociis adhibitis accedit ad S. Faustae virginis et martyris sepulchrum ». Trans. S. Faustae, Acta SS. Boll., janv. I, p. 727. Torna al testo ↑

[Note a pag. 25]

(1) « Cum immenso tremore et fiducia operculum sarcophagi, in quo sancta membra quiescebant revolvit ». Trans. S. Faustae, Acta SS. Boll., janv. I, p. 727. Torna al testo ↑

(2) « Levantur sanctissima ossa ex tumulo, ubi multo tempore jacuerant et linteaminibus praecipuis involuta... ». Transi. S. Faustae, Acta SS. Bail., janv. I, p. 727. Torna al testo ↑

(3) « Dum die Theophaniae – Missae peracto ordine – Divinum post officium – Venitur ad convivium... – Cum pranderent alacriter... ». Transl. Rhyt. S. Fidis. « Post divina missarum peracta solemnia cum omnes ad communem refectionem sumendam, solemniter convenirent... ». Transi. en prose, Acta SS. Boll., oct. III, p. 291 et 296. Torna al testo ↑

(4) Acta SS. Boll., janvier, I, 1091-1092 et Acta SS. Boll., oct. III, 289-292. Torna al testo ↑

[Note a pag. 26]

(1) Chef-lieu de cant. du Lot, arr. de Cahors. Torna al testo ↑

(2) F. Lot, Sur la date de la translation..., dans Ann. du Midi, no 64 (1904). Torna al testo ↑

(3) Par exemple, M. le chanoine Angély déclare invraisemblable que « les gens d’armes (milites) lancés à la poursuite du gardien infidèle » se soient égarés en Gascogne, comme si, à cette époque, cartes routières et signalisation des routes existaient! Ainsi des autres invraisemblances relevées. L’auteur juge du passé par le présent, péché capital pour l’historien. Torna al testo ↑

[Note a pag. 27]

(1) « Passionem vero inerti studio ab ipsis tormentorum rudimentis compositam, et nimia brevitatis obscuritate contortam, ad rectum iter lucubratiori sermone corripere officii nostri extitit, cui etiam panca de pluribus miracula deflorantes, subjicere curavimus, totumque libellum Panaretos, quod est omnium virtutum liber, nuncupare decrevimus ». Liber miracul. S. Fidis (édit. Bouillet), L. III, prologue, p. 126. Torna al testo ↑

(2) La prétendue tumulation..., p. 95-99. Torna al testo ↑

(3) Cf. supra. Torna al testo ↑

[Note a pag. 28]

(1) Ph. Tamizey de Larroque, Un abbé de Saint-Gall à Agen au xie siècle, dans Revue d’Aquitaine, t. IX (1865), p. 338-339. Torna al testo ↑

(2) Barrère, Hist. relig. et monum. du diocèse d’Agen, I, p. 195, et Bouillet et Servières, Sainte Foy, vierge et martyre, Rodez, 1900, in-4º, p. 375. Torna al testo ↑

[Note a pag. 29]

(1) H. Delehaye, Cinq leçons sur la méthode hagiographique, Bruxelles, 1934, in-8º, p. 86-87. Torna al testo ↑

(2) La prétendue tumulation..., p. 99-100. Torna al testo ↑

(3) « Istius loci incolae – Ut dictum est saepissime – Admirabantur talia – Sanctae Fidis magnalia. – Coeperunt ergo dicere – Sese beatos affore – Si hujui almae Martyris – Ditarentur reliquiis... ». Acta SS. Boll., oct. III, p. 290. Torna al testo ↑

(4) La prétendue tumulation..., p. 100. Torna al testo ↑

[Note a pag. 30]

(1) Catalogus reliquiarum quae sunt in ecclesia collegiata sanctae Fidis de Conchis Archives de l’abbaye de Conques. Torna al testo ↑